"Ne fais pas attention à moi. Je viens d'une autre planète. Je vois toujours des horizons là où tu dessines des frontières". Frida Kahlo
"Ne fais pas attention à moi. Je viens d'une autre planète. Je vois toujours des horizons là où tu dessines des frontières". Frida Kahlo

Merapi 2010: rapide approche d’un danger invisible…

Jeudi 4 novembre. Venant de Jakarta notre avion tourne inlassablement au dessus de Yogyakarta sans pouvoir atterrir en raison d’une mauvaise météo et de la cendre rejetée par le Merapi. Retour à la case départ… Quelques heures de patience et, après un nouveau départ, nous voilà enfin arrivés à destination.


Retrouvez mes images volcaniques de Java ici: Java Ouest Centre


Guy de Saint-Cyr devant une carte du Merapi, Singapour

Pourtant tout allait bien jusqu’ici. A l’escale de Singapour la consultation des sites internet des media indonésiens nous rassurait, les nuées ardentes et le panache étant parfaitement visibles sur fond de ciel bleu. Quelques personnes résident sur place contactées par internet ou téléphone avant notre départ de France nous avaient même donné tous les renseignements utiles, allant jusqu’aux points de vues et les focales à utiliser avec nos appareils photos!

Il est déjà plus de 22 heures lorsque nous arrivons près du village de Turi à 15 km du sommet du volcan en limite de la zone interdite, après avoir longé un camp de réfugiés à Pakem. Depuis quelques heures le volcan gronde de plus en plus fort et des séismes se font ressentir. Il pleut et la vue est totalement bouchée. Si nos yeux ne se régalent pas d’un quelconque spectacle, ce n’est pas le cas de notre ouïe: le volcan gronde et le « roulement » des coulées pyroclastiques se fait parfaitement entendre. La pluie qui ne cesse pas nous incite toutefois à retourner sur nos pas vers l’ouest.

Une éruption majeure du volcan

La cendre s’abat sur la région: aucune visibilité à travers les vitres de notre véhicule.

En route vers Pakem nous nous rendons compte qu’une éruption importante vient de démarrer. Une forte chute de cendres se mêle à la pluie et s’abat sur toute région; la visibilité ne dépasse maintenant pas quelques mètres. L’éclairage public s’est éteint et les seuls repères sont les phares des motos qui précèdent notre minibus dans la longue cohorte des personnes fuyant l’éruption. Cette obscurité n’est interrompue que par les fortes lueurs des éclairs qui parcourent les nuages de cendres, renforçant ainsi l’impression de fin du monde. Les vitres de nos minibus s’opacifient sous cette boue de cendre et les essuie-glaces ont fort à faire pour offrir quelques centimètres carrés de visibilité aux chauffeurs. Une odeur de brûlé envahie l’habitacle, ce ne sont pas les freins qui chauffent mais un mélange de bois, de végétation et de plastiques brûlés!

Plus bas dans les faubourgs de Yogyakarta, nous nous arrêtons comme beaucoup d’Indonésiens dans une station-service pour nettoyer tant bien que mal le pare-brise. Nous trouvons refuge dans un café et regardons une des chaines d’information TV indonésiennes: un journaliste en direct de Yogyakarta fait son « plateau » et ses interviews sous une pluie de cendre.

De retour dans les faubourgs de Yogyakarta…
un arrêt à la station service pour…
…nettoyer les véhicules.


Dans la grisaille de l’aube…

Après-coup nous apprendrons que les nuées ardentes sont descendues cette nuit-là sur 17 km, tuant plus de 120 personnes, en passant à peut-être un kilomètre de nous. Les villages de Slodokan et Argomulyo comptent leurs morts.

Nous trouvons un peu de repos près d’un ancien temple et dormons dans le minibus. Au lever du soleil la région est enveloppée dans une brume, mélange d’humidité et de cendres, il est donc impossible de discerner le Merapi. Une fois encore, seul le son du volcan parvient à nos oreilles.

L’espoir d’une amélioration des conditions météos nous fait repartir sur les routes qui cernent le volcan. Contournant celui-ci par l’ouest nous bifurquons vers le poste d’observation de Babadan, traversant villages et rizières uniformément gris. Certaines toitures et bon nombre de palmiers n’ont pas résisté au poids de la cendre.


Quatre kilomètres avant Babadan, près du village de Kragen, nous stoppons les véhicules car la couche de cendre est trop épaisse et continuons un peu à pied. Difficile de décrire l’ambiance qui règne ici. Habitants évacués, maisons closes, toitures et routes recouvertes de cendres. Quelques rares rizières arrivent encore tant bien que mal à nous offrir un peu de ces tons verts qui nous font aimer l’Indonésie. Mais toujours ce grondement omniprésent et inquiétant du volcan qui ne se montre pas. Des hommes passent en scooter; ils vont s’occuper de leurs bêtes avant de regagner, le soir tombant, leurs camps d’évacuation.

Dans le courant de l’après-midi, installation à l’hôtel pour un sommeil réparateur. Il semble malheureusement que ce fut le seul moment où l’on aurait pu voir le volcan lors de notre séjour.

A la gare de Yogyakarta, les voyageurs portent un masque contre la cendre du volcan.

Le lendemain, départ un peu « chaotique »: avions annulés et trains complets… 15 heures de minibus nous attendent pour rentrer sur Jakarta.

La chance n’était au rendez-vous côté spectacle et photos mais nous sommes revenus vivants, ce qui n’est pas négligeable! Nous quittons une région bien meurtrie. Les indonésiens, eux, restent et vont devoir attendre que le Merapi s’assagisse. Ils nous ont surpris par leur calme et leur détermination à revenir sur leurs terres dès que le volcan le décidera.



Texte et photos: Pascal Blondé – Voyage « Aventure et Volcans » effectué en Novembre 2010.

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