Au nord de la Sicile, s’étend un archipel au nom évocateur. Le dieu Eole y enfermait le vent dans des outres. Un voyage à la découverte de ces îles peut être une initiation au volcanisme sous la houlette d’un guide-géologue ou plus simplement des vacances au chaud soleil de la méditerranée sur des plages de sable noir.
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L’histoire de ces îles est bien mouvementée. Légendes et récits s’emmêlent: Eole aurait colonisé l’archipel lors de la guerre de Troie pour les uns, ce furent les Italiens méridionaux pour d’autres. De sources sûres, les Grecs de Cnide et de Rhodes débarquèrent vers 588-577 avant J.-C, avec Pentathlon à leur tête.
Tout l’archipel a été forgé par le dieu Vulcain, il ne faut guère de temps pour le constater. Ile de Vulcano: à peine débarqué de l’Aliscaphe qui relie les Eoliennes à la Sicile, on est confronté aux effluves sulfurées qui envahissent le port au gré du vent. Les bains de boue ne sont pas loins. De nombreux « curistes » y demeurent plongés de la tête aux pieds de longs moments et apprécient leurs vertus thérapeutiques. Le rinçage se fait à quelques pas de là, dans la mer de la baie orientale, où les fumerolles sous-marines tiennent lieu de jacuzzi.
Des plages de sable noir.
La plus belle plage de l’archipel, au sable volcanique d’un noir profond, s’étend le long de la baie occidentale. C’est à deux pas, car la ville et les plages s’étendent sur un bras de terre de quelques centaines de mètres de large qui relie Vulcano au petit massif volcanique de Vulcanello (vestige d’une éruption sous-marine en 183 avant J.-C).
Vulcano, lui-même, est formé de plusieurs édifices volcaniques: Vulcano Piano, Vulcano Della Fossa, et Lentia le plus ancien dont les restes forment des collines à l’ouest du volcan actuel. Vulcano Piano donna naissance, à la suite de fortes éruptions, à une caldéra – un cratère d’effondrement – d’où surgirent les cratères de Fossa 1 puis Fossa 2. Ce dernier, d’un diamètre avoisinant les 500 mètres, est actif de nos jours encore – jet de fumerolles uniquement – et une heure de monté suffit pour communier avec le volcan.
Effectuer le tour du cratère est exaltant à plus d’un titre. L’observation des anciennes bombes volcaniques montre une structure en « croûte de pain ». L’aspect lisse de la surface contraste avec l’intérieur effiloché du à la forte teneur en gaz de ces laves lors de leur éjection du cratère. Le point fort reste la traversée des zones de fumerolles; les dépôts de soufre colorent le sol en jaune vif, et, par des failles où la température oscille entre 300 et 600 degrés, les gaz d’hydrogène sulfureux qui s’échappent bruyamment des entrailles de la terre laissent une odeur nauséabonde. Dans ce monde minéral, la seule « végétation » semble être des… efflorescences de soufre.
Vulcano sous surveillance renforcée.
Ce volcan reste dangereux. Les deux dernières éruptions remontent seulement à 1771 et 1888. Vulcano est sous surveillance renforcée, les vulcanologues sont à l’affût du moindre signe d’un réveil qui n’est – ils l’affirment – pas loin…
Les plages splendides, l’eau de mer d’une pureté exceptionnelle et le soleil en ont fait un lieu privilégié du tourisme dans cette région. Des hôtels de différentes catégories y ont été ouverts, et les bateaux y déversent des flots de touristes. Le temps où l’île hébergeait une industrie d’extraction de soufre et d’alun est bien loin. Cela remonte au début du 19ème siècle et la dernière explosion a tout arrêté.
Pierre ponce blanche et obsidienne noire de Lipari.
A quelques encablures de là, Lipari est la principale île de l’archipel. Ses criques profondes, ses rochers plongeant dans la mer et ses plages en font un paysage de rêve. Son développement géologique est assez complexe, on y relève cinq périodes volcaniques, mais aucun volcan actif de nos jours. Les gisements de pierre ponce – une pierre légère d’origine volcanique – s’étendent sur plus d’un cinquième de la surface de l’île. Ils sont exploités à Canneto et Acquacalda. Lors de périodes beaucoup plus anciennes, Lipari était aussi un centre important de production d’obsidienne, cette roche noire vitreuse qui contraste avec la blancheur de la ponce.
Station balnéaire et climatique par excellence, la ville de Lipari s’étend entre les baies de Marina Corta et Marina Lunga. Maintes fois modifiée au cours des âges, l’ancienne acropole fortifiée s’élève sur un rocher de lave séparant et dominant les deux baies. La visite en est incontournable. Le musée éolien s’y trouve, à côté de la cathédrale édifiée par les Normands. Vases, stèles, sarcophages, céramiques polychromes témoignent de la longue histoire de Lipari. On y expose aussi des objets en provenance d’autres îles de l’archipel: Salina, Filicudi, Alicudi, Paranéa, Stromboli.
Un cône de 900 mètres d’altitude.
Stromboli, justement, est une des îles à ne pas manquer. Impossible de la confondre avec une autre. L’île n’est rien d’autre qu’un volcan. Une silhouette conique qui surgit des flots et s’élève à plus de 900 mètres d’altitude. Sa base repose à 1100 mètres sous la surface de la mer. Trois heures de marche sont nécessaires pour atteindre le sommet et passer une nuit à contempler le spectacle.
La lune s’éclipse par intermittence derrière les nuages de vapeurs soufrées que le vent emporte. A intervalles plus ou moins réguliers, un roulement sourd de tambours se fait entendre. Les bouches de feu crachent roches ardentes et fumées dans un bruit d’enfer. Les scories éjectées retombent et roulent sur les pentes avoisinantes.
Le Stromboli se déchaine parfois.
Plus bas, les maisons du village de Stromboli, d’une blancheur éclatante, s’étendent du bord de mer aux premiers contreforts du volcan, autour des deux églises de San Vincenzo Ferreri et San Bartolomeo.
La végétation est composée de genêts, câpriers, oliviers et figuiers de Barbarie. Le soleil est généreux, les plages sont de sable noir. On en finirait par oublier la présence menaçante du volcan.