Que l’on soit alpiniste, marcheur ou touriste de passage, la vision du Kilimandjaro est grandiose: une montagne seule, enneigée, haute de près de 6000 m, sans vallée ni massif aux alentours. Une montagne visible de loin dans les grandes plaines africaines et respectée de tous temps.
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Souvenons-nous du léopard d’Ernest Hemingway se lançant à l’assaut du Kilimandjaro ou de Ménélick, le fils de Salomon et de la reine de Saba, qui y enfouit son butin.
La signification étymologique exacte de « Kilimandjaro » est inconnue. En langue swahili « Kilima » signifie « petite montagne » mais il est difficile d’en voir une dans ce sommet. Les Masaïs, eux, n’habitent pas directement à côté mais leur « montagne de l’eau » ou « Kilimagnare » est un peu plus convaincante. Les Chaggas installés au pied du Kilimandjaro ont bien dans leur langue « Kilemieiroya », ou « montagne invaincue », mais il n’existe d’après leurs dires que le Kibo (Mont Blanc) et le Mawenzi (Mont Noir).
En effet, sur un même plateau, deux sommets séparés de quelques kilomètres se font face: le dôme du Kibo, ancien volcan culminant à 5895 mètres, recouvert de neiges éternelles et à la silhouette bien connue, et le Mawenzi aux dents accérées (5151 m).
Le Kilimandjaro demeure le pôle d’attraction de la visite de la réserve kenyane d’Amboseli d’où il est parfaitement visible, bien qu’étant entièrement sur le sol tanzanien. Ce dernier en a fait un symbole national. Le jour de l’indépendance, le 8 décembre 1961, une flamme de la liberté y fut allumée sur le point le plus élevé, rebaptisé alors pic de la liberté ou « Uhuru Peak ».
1989: le centenaire de la première ascension.
Depuis H. Mayer qui le premier parvint au sommet le 6 octobre 1889, bon nombre de personnes s’y sont attaqués. L’ascension du Kibo par Marangu Gate ne nécessite aucune connaissance d’alpiniste et est praticable par toute personne en très bonne condition physique et un tant soit peu entrainée à la marche. Ce n’est pas le cas du Mawenzi moins haut mais techniquement plus difficile.
Il ne faut pas négliger les problèmes liés à l’altitude. Les maux de tête, les nausées et les insomnies sont courants. On ne passe pas de 1800 à 5900 mètres en quelques jours sans subir les conséquences de la raréfaction de l’air. A 5000 mètres la pression atmosphérique n’est plus que la moitié de celle au niveau de la mer. La marche lente et le respect des étapes sont primordiaux pour éviter oedèmne pulmonaire ou cérébral aux conséquences toujours désastreuses.
A chacun de contrôler ses forces et ses capacités et de prendre la décision de rebrousser chemin si besoin. Tant pis pour le diplôme attestant que l’on a atteint le sommet à Uhuru Peak ou même seulement le bord du cratère à Gillman’s Point (5685m).
On part donc en connaissance de cause accompagné d’un guide, et avec ou sans porteurs. Pour un groupe d’une quinzaine de personnes, il y a généralement 2 guides, 2 assistants-guides et 18 porteurs pour une courte expédition de 5 ou 6 jours. De nombreux organismes de voyages à pied proposent cette ascension, généralement associée à une visite des réserves tanzaniennes.
De la forêt dense aux neiges éternelles.De la forêt dense aux neiges éternelles.
Marangu Gate, 1860 mètres, l’entrée du parc national du Kilimandjaro. Les villages Chaggas, au milieu des plantations de caféiers et des bananeraies sont juste en dessous. La chaleur africaine se fait sentir. Difficile d’apercevoir le sommet bien souvent au-dessus de la couche nuageuse.
La marche commence ici par la traversée d’une forêt dense où tout est féerique, des fougères gigantesques aux lianes enlaçées autour des arbres. Seulement trois heures de marche, et, à 2743 mètres d’altitude, le refuge de Mandara Hut apparaît.
Avec l’altitude, la forêt laisse la place, dès le deuxième jour, à une prairie alpine où poussent lobélies et séneçons géants. Au refuge de Horombo (3720m) – fin de la seconde étape longue de cinq heures – ceux qui descendent du sommet livrent leurs impressions aux équipes montantes. Le moral en prend un petit coup.
Pour beaucoup, il est plus prudent de demeurer ici un jour de plus, pour s’acclimater à l’altitude, en profitant de cette journée pour aller voir de plus près le Mawenzi. Mais le jour du départ pour Kibo Hut arrive et tout le monde est fin prêt.
C’est de plus en plus impressionnant. Les dernières traces de végétation disparaissent vite, et les nuages lèchent le sol. De cette atmosphère nébuleuse, Mgr Le Roy en parlait au début du siècle comme de « quelque chose comme un paysage d’après la mort, dans un quartier des limbes ».
La traversée de la selle, plateau venteux parsemé de blocs rocheux, annonce la proximité de Kibo Hut, le dernier refuge au pied du dôme enneigé. Là, s’arrêtent les porteurs qui attendront les marcheurs jusqu’à leur retour du sommet. L’altitude se fait sentir – 4703m – mais il est quatorze heure et il est temps, après s’être restauré, de se coucher et d’essayer de trouver le sommeil coûte que coûte. Un dernier repas pris vers six heures du soir et retour au lit.
Gillman’s Point, le bord du cratère.
Vers une heure du matin, c’est parti pour l’ascension finale. A la lueur des lampes de poche ou du clair de lune se forme la file indienne des marcheurs. La pente est très raide – 45 degrés – et la progression se fait en zigzag.
Pour ceux qui n’abandonneront pas en cours de route, bravant le froid et l’altitude pendant cinq heures, la vision fantastique du lever de soleil les récompensera au bord du cratère à Gillman’s point. Et ce n’est pas fini! Le sommet Uhuru Peak demande encore plus de deux heures d’effort en longeant le cratère, ses glaciers et leurs séracs.
Le retour est tout aussi fatigant. Il faut redescendre jusqu’à Horombo via Kibo Hut soit au total… 12 heures de marche la même journée. Et remettre ça le lendemain de Horombo à Marangu Gate (28 Km, 7 heures de marche).
Là se termine l’ ‘aventure’. Il n’en reste que des visions paradisiaques de neiges éternelles et un beau diplôme au fond des bagages.